« Donner à tou.te.s une chance de s’en sortir »

Mashami est salariée en insertion au tri à Emmaüs Campüs, sur le site de Cap18. D’origine ivoirienne, elle est arrivée en France en 2019. Elle est accompagnée au quotidien par Emma, son encadrante, et Alicia, sa chargée d’insertion professionnelle.

Mashami raconte-nous ton quotidien chez Emmaüs Campüs.

Je suis chez Emmaüs Campüs depuis 6 mois. Ici je commence à 9h30 et je finis à 15h30. Je me réveille à 6h30, je prépare les enfants, je leur fais prendre leur petit-déjeuner. On part à 7h, je les dépose à l’école, ensuite je prends le train pendant 1h30 et j’arrive ici à 9h30. Chaque jour on fait du tri : textile, chaussures, bibelots, livres, jouets… On prépare les produits pour les ventes spéciales étudiant.e.s et pour la boutique du 13e.

Emma comment accompagnes-tu Mashami au quotidien ?

Le but avec Mashami c’est de la pousser vers un emploi adapté et qu’elle prenne conscience de tout ce qu’elle est capable de faire. En la voyant travailler au textile et aux chaussures, je vois quelqu’un de très indépendant, qui travaille très bien, qui a un bon œil, mais qui a aussi beaucoup de charges, qui porte ses enfants toute seule, qui fait des énormes journées. C’est une vraie warrior ! Dans mon accompagnement mon but c’est donc de lui faire prendre confiance en elle, de l’aider à progresser sur ses quelques freins comme la lecture ou l’écriture par exemple et qu’elle sorte d’ici prête à assurer un bon emploi.

Mashami que t’apporte l’accompagnement d’Emma ?

Ça se passe très bien. Elle me soutient, Alicia aussi. Ici on vient pour se former, pour apprendre comment travailler ailleurs, comment se comporter, etc. Je sais que ce n’est qu’un passage pour chercher un autre travail.

Alicia quel rôle joues-tu dans l’accompagnement de Mashami ?

La particularité de Mashami c’est que c’est une maman seule de deux enfants et bientôt d’un troisième. Dans l’accompagnement que j’ai à faire avec elle c’est vraiment lever tous les freins périphériques. On travaille sur le logement parce qu’actuellement elle vit en centre d’hébergement avec ses deux petites. Mais on fait aussi toutes les démarches pour qu’elle puisse accéder à un logement social assez rapidement. Enfin, on va travailler aussi la parentalité, les rendez-vous médicaux, les démarches administratives et également son projet professionnel. Elle souhaite travailler dans le domaine de la vente, en lien avec les clients. Avec Emma elle travaille le savoir-être qu’il faut avoir pour accéder à ce type de poste et avec moi l’amélioration de son CV et la préparation aux entretiens d’embauche.

« C’est vraiment quelqu’un de battant, motivé, dynamique, une vraie guerrière ! »

Alicia
Responsable de l’accompagnement à Emmaüs Campüs

Mashami que retiens-tu de l’accompagnement d’Alicia ?

Ça se passe bien aussi, elle m’aide sur tout : le logement, les papiers pour la Caf, Pôle Emploi, le travail…

Alicia selon toi quelles sont les clés d’un accompagnement réussi ?

Je ne fais pas sans, je fais avec eux.elles.

C’est une co-construction, il faut qu’ils.elles adhèrent à l’accompagnement, qu’ils.elles comprennent les enjeux et aussi qu’ils.elles soient investis, c’est le cas de Mashami qui l’est depuis le début. Après c’est une remise en question tous les jours, on ne sait jamais si on fait bien ou pas. On essaye d’être au plus juste, ce n’est jamais parfait mais on essaye chaque jour de faire au mieux pour eux.elles.

Et pour toi Emma ?

Pour moi un bon accompagnement c’est réussir à répondre au paradoxe de créer un espace de travail qui est bienveillant, inclusif, qui soit une respiration pour tout le monde, mais aussi de bien leur faire comprendre qu’ici ce n’est qu’un passage, que l’objectif c’est d’apprendre pour ensuite partir avec un autre travail ou une formation. Il faut à la fois que le travail soit positif et leur apporte énormément de choses, mais aussi qu’ils.elles aient envie de partir.

Pour moi un accompagnement réussi c’est quand quelqu’un.e s’en va content.e et avec un bagage d’acquis, que ce soit au niveau du savoir-être ou de compétences plus techniques, qu’ils.elles aient avancé, qu’on ait levé des freins, qu’ils.elles soient prêts à affronter le monde du travail extérieur qui peut être plus dur qu’ici.

« On souhaite qu’ils s’insèrent dans quelque chose de plus durable, c’est tout le sens de mon travail ici. »

Emma
Encadrante tri pour Emmaüs Campüs

Alicia quelle est la particularité de notre chantier par rapport à d’autres ?

Personnellement je mets vraiment l’accent sur la non-sélection et le fait de permettre à des femmes isolées comme Mashami d’accéder à l’emploi. Ici on a aménagé les horaires pour ça. Notre chantier lui permet d’accéder à l’emploi car dans d’autres chantiers elle n’aurait pas eu cette possibilité à cause des horaires. Les nôtres sont facilitateurs : les salarié.e.s travaillent de 9h30 à 15h30. Mashami et les autres mères célibataires ont le temps le matin d’aller déposer leurs enfants avant d’aller travailler, puis après à 15h30 d’avoir leur deuxième vie de maman et d’aller récupérer les enfants à la crèche ou à l’école et de s’en occuper.

Le fait de ne pas faire de pré-sélection est aussi important. On a un public en très grande exclusion, qui peut sortir de prison ou être porteur d’un handicap, d’autres chantiers ne sont pas en mesure de les accueillir.

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