L’histoire de Nicolas, c’est celle d’un gamin puis d’un homme que la vie n’a pas épargné. Une histoire d’abandon, de fuite, de délinquance, mais aussi de liberté et de fierté. C’est l’histoire de quelqu’un qui a réussi à reprendre son parcours en main pour aujourd’hui se construire un avenir heureux.
« Je m’appelle Nicolas et je vais vous raconter mon parcours de vie. Vous verrez que la morale, dans cette histoire, c’est que celui qui le veut peut s’en sortir. »
En 1998, Nicolas n’a que 16 ans lorsqu’il perd sa mère. Il se retrouve alors seul avec un père dévasté, et sa petite sœur qui rejoint une famille d’accueil. Nicolas apprend à se débrouiller seul et, face à un père qui ne s’occupe pas de lui mais ne lui donne aucune liberté, il rêve d’indépendance.
Un jour où il part retrouver sa sœur à Paris, il rencontre un homme qui vit dans un squat à Fontaine Michalon dans le 92. C’est là qu’il prend la décision de le rejoindre, et donc de partir dans la rue. A cette époque, il fume, il boit un peu, et pour s’en sortir il vole dans les magasins, deale parfois, fait la manche. Mais cette routine prend fin lorsqu’un jour, la police débarque au squat : le bâtiment va être démoli, il faut quitter les lieux !
C’est le début d’une longue période d’itinérance. Nicolas part d’abord à Grenoble avec un groupe de « zonards ». La journée, il fait la manche avec sa copine, mais il déteste cela : « j’avais l’impression d’avoir perdu ma dignité, je ne pouvais plus garder la tête haute ». Il se remet alors au deal de shit. Il consomme beaucoup aussi : shit, alcool, coke, exta, mais pas d’héroïne ni de LSD. « Je suis tombé dans l’autodestruction », raconte-t-il.
Nicolas a la bougeotte ! Il fait le tour de la France : Chambéry, Aix-les-Bains, Bordeaux, Toulouse, Bayonne, Biarritz, Dax, Marmande, Nice… Il se déplace avec des voitures volées, ou en fraudant le train. A cette époque, il ne travaille pas beaucoup, à peine un petit job d’éboueur à Grenoble en intérim pendant 2 semaines. Il se définit comme anarchiste : « je voulais faire ce que je voulais, je m’en fichais de toutes les lois, des gens, du taf ». Il vit ainsi pendant 2 ans.
Regrette-t-il d’avoir décidé de partir à la rue ? « Je dirais que non. C’est là que j’ai appris à me débrouiller. Dans la rue, tu ne peux compter que sur toi-même, et tu apprends à te débrouiller avec ce que tu as. Tu apprends à faire un réchaud avec une boîte de conserve par exemple ! Ça te rend indépendant et débrouillard. »
Nicolas revient à Paris en 2004. Pendant 6 ans, il zone en région parisienne et passe par des foyers, des squats, des associations, des hôtels du 115, ou par la rue. Parfois, il parvient à intégrer un hôtel social (où l’on paie au mois) mais jamais bien longtemps. Le temps que le dossier APL aboutisse, il faut commencer à payer, ce qui est impossible avec son RSA, donc retour à la rue ! Et comme il continue à consommer, il n’a pas d’argent. « On dit souvent qu’on peut s’en sortir quand on est dans la rue, mais il faut un mental d’acier : si tu ne l’as pas, t’es mort. C’est dur, la rue. »
Les choses commencent à changer en 2010, lorsqu’il obtient enfin un hôtel social longue durée à Saint-Ouen. Il commence à réfléchir à son avenir et se reprend en main : il supprime l’alcool, les clopes, la drogue. Il travaille un an en tant qu’agent dans l’entretien d’espaces verts à Clignancourt. La suite, c’est 2 ans au Maroc puis 5 ans d’incarcération « pour des conneries que j’ai faites ». Comment a-t-il vécu la prison ?
« La rue, c’était dur, mais la prison, c’est différent : tu es privé de liberté, on te brise psychologiquement, on te vole ta dignité avec des fouilles corporelles. »
Depuis la prison, Nicolas prépare son avenir et se tourne vers Emmaüs. Une conseillère en insertion lui parle d’Emmaüs Défi et, après avoir fait toutes les démarches nécessaires, il commence à y travailler en septembre 2020. Il essaie plusieurs activités du chantier d’insertion, et finit par rejoindre l’équipe qui anime la boutique en ligne d’Emmaüs Défi sur le site Label Emmaüs.
De son côté, Nicolas est aussi devenu auto-entrepreneur : il vend des parfums et des survêtements, et a même commencé à créer son propre site. Pourquoi l’auto-entrepreneuriat ? « Être indépendant, ça me correspond bien ! Après toutes mes expériences, toutes les personnes qui m’ont déçues, j’ai l’impression que je ne peux compter que sur moi-même. » Il prévoit donc de se former davantage sur les outils de vente en ligne, pour réaliser la maintenance de son site et développer son entreprise. Il espère aussi trouver un logement pérenne :
« On a des demandes en cours avec les associations qui m’accompagnent, mais vous me connaissez maintenant… Si je peux avancer seul, je le ferai ! »